555 55 55 55

Edition du vendredi 23 mai 2025

Crise monétaire à Bukavu : Les habitants obligés à faire preuve d’une adaptabilité constante

Dans les rues bouillonnantes de Bukavu à l’Est de la République Démocratique du Congo, échanger des dollars américains est devenu un véritable parcours du combattant. 

Au-delà des taux d’échange fluctuants, l’état physique des billets est désormais un facteur déterminant dans les transactions. Un billet froissé, déchiré ou légèrement taché peut être catégoriquement refusé, peu importe sa valeur nominale.

Actuellement, un dollar américain se change selon l’humeur du bradeur. L’instabilité du taux accentuée par la crise sécuritaire et humanitaire varie entre 2 850 et 3 300 francs congolais, selon les quartiers et les circonstances. 

Cette variation importante ajoute un flou constant pour les consommateurs et commerçants, déjà pris dans l’étau d’une économie informelle.

L’impact de la crise sécuritaire

La situation monétaire est d’autant plus critique que la ville continue de subir les effets d’une crise humanitaire et sécuritaire persistante. 

Les flux économiques sont perturbés, les produits de première nécessité sont de plus en plus chers, et les citoyens doivent jongler entre la survie et une monnaie de plus en plus capricieuse.

Le paradoxe est criant : la valeur du dollar à Bukavu ne dépend plus seulement des marchés financiers mondiaux, mais aussi de son apparence.

« On peut vous refuser un billet de 100 dollars s’il a une petite coupure ou une tache. C’est une double peine », témoigne M. Alfonse Cirhuza, un commerçant du marché central de Kadutu. Cette exigence crée des tensions et ralentit les échanges.

Télécommunications et difficultés d’accès au cash

Dans ce climat économique tendu, le système de téléphonie mobile, souvent utilisé pour les transferts d’argent, ne suffit pas à compenser le manque de liquidités. De nombreux points de retrait sont en rupture de cash. 

Dans certains quartiers, obtenir 5 ou 10 dollars relève de l’exploit. Des files se forment devant les points M-Pesa ou Airtel Money, mais les montants disponibles sont parfois insuffisants pour couvrir ne serait-ce que les dépenses d’un ménage.

« Vous faites un retrait de 100$ et vous remet 90$, l’agent M-Pesa ou Airtel Money retient 10% de commission, et même, c’est devenu difficile à avoir», s’insurge un habitant.

Une précarité renforcée

Dans une ville où la majorité de la population vit au jour le jour, chaque centime perdu compte. L’incertitude monétaire oblige les habitants à faire preuve d’une adaptabilité constante. Mais cette pression quotidienne aggrave la précarité.

« Aujourd’hui, même avec 10 dollars, tu peux passer la journée sans pouvoir rien acheter si le billet est mal accepté », confie Judith Bisimwa, une mère de famille.

Face à cette instabilité, nombreux sont ceux qui appellent à une réglementation plus claire sur les critères d’acceptabilité des billets et à une meilleure coordination entre les banques, opérateurs télécoms et autorités monétaires. 

En attendant, à Bukavu, l’économie informelle continue de dicter sa loi, au détriment des plus vulnérables.

Article produit dans le cadre du projet « Habari za Mahali ». Un projet du consortium RATECO, REMEL avec le soutien de Media4Dialogue de LaBenévolencya

Logo

©Droits d'auteur. Tous droits réservés.

Nous avons besoin de votre consentement pour charger les traductions

Nous utilisons un service tiers pour traduire le contenu du site web qui peut collecter des données sur votre activité. Veuillez consulter les détails dans la politique de confidentialité et accepter le service pour voir les traductions.