Edition du samedi 07 juin 2025
Depuis plusieurs mois, une pénurie inédite de produits brassicoles bouleverse les habitudes des habitants de Bukavu. Dans les débits de boissons, les bouteilles de bière se font rares, voire introuvables, et les prix s’envolent.
La fermeture temporaire de la Bralima, la principale société brassicole de la région, pour des raisons sécuritaires est à la base de cette situation. Cette fermeture dépasse de loin une simple rupture d’approvisionnement en bière ; elle expose les failles profondes d’une économie locale fragilisée.
« Avant, on vendait la bière à 3 500 ou 4 000 francs congolais. Aujourd’hui, c’est à 8000 francs la bouteille ! », s’indigne, Sylvie Ngalula, vendeuse des produits Bralima.
Elle pointe du doigt une hausse brutale des prix, notamment liée à la spéculation et à la rareté des stocks. « On la vend à la chèque », dit-elle en évoquant un mode de vente à crédit devenu risqué tant l’incertitude plane sur l’approvisionnement.
Faute de produits disponibles, les commerçants tentent tant bien que mal de se réorganiser.
« Nous avons obtenu une pompe à Bralima qui nous facilite, mais même ça ne suffit pas. La demande est trop forte », poursuit-elle.
Une filière entière paralysée
Ce sont non seulement les revenus des commerçants qui chutent, mais aussi le pouvoir d’achat des ménages qui s’effondre face à cette inflation.
Pour Blaise Musole, membre de la Société Civile, l’enjeu est bien plus grave qu’il n’y paraît.
« Derrière l’absence d’une bouteille de bière se cache une crise économique majeure », déclare-t-il.
La Bralima, pilier économique de la ville, ne produisait pas uniquement des boissons alcoolisées ; elle faisait vivre des centaines de petits commerçants, revendeurs de sous-produits tels que le drèche utilisé comme aliment pour le bétail.
« Aujourd’hui, des éleveurs de porcs, de vaches, et même de poissons ne trouvent plus de drèche pour nourrir leurs bêtes. La production animale diminue, les prix grimpent, et les marchés sont de plus en plus désertés », alerte Blaise Musole.
Une précarité sociale aggravée
La fermeture de la Bralima touche en particulier les femmes commerçantes, souvent à la tête de micro-entreprises qui dépendaient de la société pour écouler des boissons ou revendre des produits dérivés.
« Il y a beaucoup de mamans qui survivaient grâce à ça. Aujourd’hui, elles n’ont plus rien. C’est une catastrophe silencieuse », confie un habitant du quartier Kadutu.
Au-delà de la sphère économique, c’est tout le tissu social qui vacille. Les pertes d’emplois directs et indirects, la baisse des revenus des familles et l’incertitude qui règne plongent la population dans une insécurité croissante, alors que la région reste déjà marquée par des tensions sécuritaires et humanitaires.
La société civile appelle les autorités locales et nationales à une réponse urgente pour endiguer cette crise. Elle propose la mise en place de circuits alternatifs d’approvisionnement, relance sécurisée des activités de la Bralima ou soutien aux éleveurs pour éviter l’effondrement de la filière animale.
La Rédaction
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